INTERVIEW: Stéphane LY-CUONG
 

 

Peux-tu brièvement nous raconter l'histoire de Paradisco?

Paradisco est l'histoire d'un homme d'une quarantaine d'années qui se souvient de ses vingt ans, de ses rêves, de ses espoirs au temps du disco, à la fin des années 70...

C'est un film qui parle de choses plutôt graves mais qui ne manque pas d'humour. Comment l'idée du film t'est-elle venue? Qu’est-ce qui a nourri l’écriture du scénario ?  

Au départ, j'ai écrit ce scénario avec Fabien Paul dans le cadre du concours "L'amour est à réinventer", un concours de scénarios autour de l'homosexualité, qui a eu lieu en 1996. Il y avait plusieurs thèmes proposés et j'ai choisi "Que sont mes amis devenus?". J'avais envie de parler du deuil, de la mémoire, mais pas d'une façon conventionnelle, triste et dramatique. Je voulais que le personnage de François se souvienne de ses amis disparus mais qu'il se souvienne d'eux dans leurs moments de joie, d'espoir, de rêves et que cette énergie positive lui serve à avancer et non pas à stagner dans le passé.

Pourquoi as-tu eu envie de situer l'histoire en 1979?  

La génération des gays de 40-50 ans a été particulièrement touchée par le SIDA. Et j'ai eu envie de parler de leur vingt ans à eux, à la fin des années 70 avant le SIDA, une époque différente, insouciante où l'on croyait sans doute que l'avenir serait rose. C'était aussi une façon de parler du thème des rêves de jeunesse.

Comment as-tu choisi les comédiens? Pourquoi?

J'ai choisi les comédiens en fonction de leur correspondance au rôle, évidemment, de leur talent, mais aussi en fonction de leurs qualités humaines. Et au final, je ne me suis pas trompé sur ce point-là car c'est un peu comme si une famille s'était créée autour de Paradisco. C'est tellement plus agréable de travailler dans une ambiance harmonieuse, détendue et amicale. Le tournage a été intense mais en même temps, j'étais tellement bien entouré que je me sentais bien.

Au final, qu'est-ce qui t'as plu le plus dans cette distribution?

Et bien, c'est cette cohésion, cet esprit de famille qui s'est créé. C'est une véritable magie.

Pensais-tu déjà à Jérôme pour jouer le rôle de François au moment de l'écriture?  

Non. Le scénario a été écrit en 1996 et je ne pensais pas à Jérôme à ce moment-là. Je pense qu'il aurait été un peu trop jeune à l'époque.

As-tu quelques souvenirs particuliers du tournage ou quelques anecdotes qui t'ont marquées?

Il y en aurait trop. L'enregistrement studio a été un moment très émouvant. Notamment lorsque Jérôme a enregistré sa chanson quasiment en une seule prise avec une grande émotion et beaucoup de subtilité. Je me souviens que Fabienne Elkoubi le regardait à travers la vitre avec les larmes aux yeux. Sinon, on se moquait beaucoup de moi les premiers jours de tournage car j'étais tellement stressé que j'avais un lumbago qui me bloquait totalement le dos. Je marchais comme un vieillard de 90 ans. On m'appelait Akira Kurosawa. L'avantage, c'est que tout le monde venait me faire des massages !

Quelle est ta façon de travailler avec ton compositeur, Patrick Laviosa?

Nous avons beaucoup de références communes avec Patrick. C'est donc très facile de communiquer. Je lui explique l'esprit de la chanson, l'ambiance, la couleur que je désire puis il me propose une première mélodie et ensuite, nous partons de cette base pour développer la chanson. Il adapte sa musique en fonction du timing dont j'ai besoin, et moi, je réécris des paroles en fonction de ses mélodies. Mes premiers textes sont toujours indicatifs et non définitifs.

Comment as-tu mis en scène Paradisco? Quelle liberté laissée aux acteurs? Tout est-il prévu très précisément à l'avance ou travailles-tu à l'instinct?

Je donne mes indications aux comédiens, à l'équipe technique et ensuite, eux me font des propositions que j'écoute et que j'accepte si elles vont dans l'esprit du film. Réaliser un film, c'est toujours un échange, un dialogue, l'essentiel, c'est de se comprendre et d'aller dans la même direction.

Pour une comédie musicale, il y a des contraintes certaines puisqu'il faut respecter la musique, le play-back, la chorégraphie, etc, la marge de liberté n'est pas forcément grande sur le tournage même, mais tout est possible lorsqu'on se trouve encore en phase de création ou de préparation.  

Pour toi, que retires-tu de cette deuxième expérience de court métrage musical?  

J'apprends et j'espère apprendre toujours... Tout simplement, je me familiarise avec ce métier, le fait de diriger une équipe (beaucoup plus importante cette fois) et le nouveau facteur de ce film a été la chorégraphie, mais franchement, avec des chorégraphes tels que Patricia Delon et Laurent Doëzy, ça a été une partie de plaisir... et de rigolade!

Vas-tu continuer à faire des courts métrages?  

J'espère pouvoir passer au long après Paradisco, mais il ne faut jamais jurer de rien...

Comment trouve-t-on le financement pour un court-métrage?  

Principalement via des institutions telles que le Centre National de la Cinématographie, la SACEM ou encore la Procirep. Certains réalisateurs s'auto-financent mais ce n'est pas mon cas !

Parle-nous de ta maison de production...  

Athanor Studio est géré par Gabriel Mamruth et Sandrine Cassidy. J'ai rencontré Gabriel il y a dix ans mais Paradisco est notre premier projet commun. Ce que j'apprécie en dehors des compétences de Gabriel et Sandrine, ce sont leurs qualités humaines et la relation de confiance qui s'est instaurée.

Combien de temps as-tu mis pour réaliser le projet?  

Dans sa version comédie musicale (au départ, le scénario n'était pas musical lorsque nous l'avons écrit en 96), nous avons mis plus de deux ans et demi à réaliser le projet.

Tu as maintenant réalisé deux films musicaux. Est-ce un hasard professionnel ou une orientation que tu souhaites donner à ta carrière ?  

J'adore la comédie musicale et même si tous mes films ne seront pas systématiquement des comédies musicales (certains sujets ne s'y prêtent pas, à mon avis), la musique y aura toujours une place importante. La liberté du court-métrage, c'est que je peux prendre des risques, oser des choses que l'on ne fait pas dans le long. On ne cherche pas à faire des recettes avec un court, on peut donc se permettre plus d'audace.

Te définis-tu plutôt comme auteur de scénarios ou comme réalisateur?  

Les deux. Mais cela ne me dérangerait pas de réaliser le scénario d'un autre si je m'y reconnais. En revanche, si j'écris quelque chose, je ne m'imagine pas le confier à un autre réalisateur.

Quels sont tes prochains projets?  

J'écris actuellement un scénario de long-métrage et je suis de près la carrière de Paradisco !

  04/11/2002
www.jeromepradon.com