THEATRE: ROAD MOVIE
 

 

ON S'EXCUSE DE VOUS DEMANDER PRADON!

Le théatre nous réserve parfois de belles surprises. C'est bien une rencontre magique entre un texte superbement émouvant et un grand comédien, Jérôme Pradon, que nous conduit Road Movie. Plus qu'un beau moment de théâtre, c'est l'un des événements de la rentrée!

Dramaturge américain contemporain, Godfrey Hamilton a déjà été largement récompensé pour son oeuvre, marquée par un combat obstiné contre le racisme et l'homophobie. On lui doit notamment "Sleeping with you" (1993), "Kissing Marianne" (1994) et "Viper's Opium" (1997). Distingué au festival d'Edimbourg en 1995, Road Movie dans un style typiquement américain, traduit les angoisses et les drames provoqués par l'épidémie du sida. L'ambition est ici de faire un travail de mémoire, de rendre hommage à ceux qui sont partis mais aussi à ceux qui restent et se battent. Mêlant le pathétique et l'humour, Godfrey Hamilton donne vie à des personnages d'une formidable humanité, capables de trouver en eux la force d'affronter les affres de la vie.

Joël est un New-Yorkais de 35 ans qui cherche, de son propre aveu, le bonheur dans des lieux bien étranges. Lors d'une soirée où il a bu plus que de raison, il croise Scott qui le prend en charge et le ramène chez lui. Mais Joël doit repartir à New York où il vit et si le téléphone permet de pallier l'éloignement, il ne remplace pas une vie commune. Lorsque Joël comprend qu'il a besoin de son ami, il saute dans sa voiture et traverse le pays pour rejoindre la côte Ouest. Durant son périple, il rencontre trois femmes ayant toutes en commun d'avoir perdu un proche atteint de la maladie. L'une d'elle est devenue une passionnaria excentrique de la prévention. Chacune à sa manière tente de surmonter l'épreuve.

Un homme seul interprète ces différents personnages avec toute l'authenticité que Godfrey Hamilton leur a donné, sachant faire passer tour à tour, l'émotion, le rire et une formidable tendresse. Jérôme Pradon, mis en scène par Nikola Koretzky, s'impose avec une force et une finessse suprenantes. Celui qui a joué dans "Vatel" de Joffé, "The Dancer" de Besson, qui s'est affirmé dans les plus grandes comédies musicales anglo-saxonnes (rôles de Chris dans "Miss Saigon", Marius dans "Les Misérables", Raspoutine dans "Killing Rasputin", "Whistle Down The Wind" et "Jesus Christ Superstar" d'Andrew L. Webber), a choisi d'adapter et de monter Road Movie sur un coup de coeur. A ce propos, il nous a confié: "Je voulais être seul sur scène pour montrer ce que je pouvvais faire. J'ai choisi cette pièce car elle aborde des sujets qui me touchent, avec un langage universel qui est celui de l'Art. Et aussi parce qu'elle nous donne envie de vivre pleinement!".

Avec une modestie qui l'honore, il avoue que le spectacle reposant entièrement sur ses épaules, l'idée d'échouer le terrorise. Nous savons cette éventualité farfelue, il est inimaginable que le public boude Road Movie! Les instants de bonheur sont trop rares pour nous priver de ceux que nous offrent Godrey Hamilton et Jérôme Pradon!

  Philippe Escalier
Garçons Magazine
30/09/01